La première partie de cette ronde fut celle de Wang Yue-Adams qui s'acheva sur une nulle raisonnablement rapide. Ils ont joué une ligne théorique de l'Indienne (variante hybride Reine/Nimzo) dans laquelle les Noirs donnent un pion pour une compensation structurelle. 15...0-0-0 fut une nouveauté forte de Adams, et on dirait que dès aujourd'hui le statut théorique de cette ligne est « bon pour les Noirs ». « Il a très bien joué » dit Wang Yue, « Rh8-f8-f5 était une bonne idée et ma seule chance aujourd'hui était une nulle ». Adams a aussi pensé à doubler les tours via f7/f6 mais après les Blancs défendent leur pion en f avec e3-e4 et Ra1-d1-d3. Les Noirs ne jouent alors là que pour une nulle ». Wang Yue ajouta que cela donne la possibilité aux Blancs de e4-e5. Lors de la partie, il réalisa que malgré son pion supplémentaire il était légèrement moins bien, et qu'en jetant le superflu et en activant son roi avec 27.f4! il s'assurait d'une nulle.

Le troisième match du tournoi entre Azéris, Gashimov-Radjabov, finit également par un nul. Gashimov évita la Jänisch de Radjabov avec 3.Bc4 et atteignit une finale légèrement supérieure. Radjabov eut des doutes quant à sa (nouvelle) idée 8...h6 et 9...Nh7 mais combinée avec 12...hxg5! ce n'était pas si mal pour les Noirs. (Il a également expliqué que c'est à cause du cavalier Blanc en c3 que le coup...f5 ne peut pas être joué dans cette position.) Gashimov a pensé qu'au lieu de 15.Bd5, 15.g4!? aurait été mieux; il avait prévu de le faire si les Noirs avaient joué 15...Nb4 16.Bb3 Nc6. A la fin Shipov avait une préférence pour la position des Noirs à cause des deux fous, mais ils ne pouvaient plus jouer un rôle important car les Blancs avaient accélérés la nulle par répétition de coups.

Svidler-Grischuk, la troisième nulle de la journée, fut une bataille relativement excitante entre les deux Russes. Cela a commencé par la rare mais néanmoins intéressante Variante Yandemirov de la Ruy Lopez. Svidler a commencé la conférence de presse par « Un nouveau jour, une nouvelle ouverture surprise ». Il avait déjà joué auparavant le plus critique 7.Bxc6+ bxc6 8.d4 (contre Yandemirov lui-même, en 2003) et s'attendait à ce que son adversaire ait quelque chose dans sa manche. Il opta ainsi pour une ligne qui allait vite prendre fin - « Je ne revendique aucun avantage là, j'ai juste pensé que cela était intéressant à jouer ». Suite à 8.d3 Grischuk pensa longtemps à 8...Nge7, jusqu'à ce qu'il découvre 9.hxg4! hxg4 10.Ng5 Qh6 11.f4! et au lieu de 18...d4 il y avait aussi 18...Ng6 mais ensuite « les Blancs jouent 19.Bxc6 bxc6 20.Raf1 dxe4 21.dxe4 Rd3 22.Nc4 » - Grischuk. Le coup de Svidler 20.Rh5 était le plus forcé et en effet semble conduire à une nulle presque par force, comme l'a démontré la suite de la partie. A la place Shipov aime 20.Raf1 après lequel il préfère les Blancs. Une dernière chance de continuer la partie était 34...f6!? lorsque Svidler avait prévu 35.Nc4 Rd4 36.Nd2.

D'une Anti-Marshall, la partie Inarkiev-Navara a atteint une position typique de la Archangelsk de la Ruy Lopez. Cette fois-ci Inarkiev en sortit vainqueur, après que son adversaire se soit retrouvé en difficulté avec le temps au lieu de lui. Les deux joueurs ont exposé leur partie sur le tableau de démonstration lors de la conférence de presse. Un coup fort fut 18.Nc3! et là, les deux joueurs n'ont pas aimé le coup 18...dxe4 - Inarkiev a suggéré 18...Qd6!? et Navara lui-même préféra 18...Bb7. Inarkiev dit « 24.Ra1 était un coup risqué à cause du contre jeu des noirs sur l'aile roi » en donnant la ligne 24...Ra8!? 25.Ra3 (à jouer 26.Nc3) 25...Ra6. Une autre option pour les Noirs était 25...Nh5!? 26.Nc3 Nf4. Dans cette partie, Inarkiev a réagi très précisément aux attaques des Noirs (32.Rd1!, 34.Qd2!) et a de cette manière pu arrêter l'initiative de son adversaire. Navara avait perdu beaucoup de temps et autour du 33^ème coup environ, il ne lui restait plus qu'une minute. Autrement, il aurait peut-être trouvé le coup 34...Nf4, comme suggéré par Shipov, ce qui prolonge la bataille^.

Peu après cet intéressant show, les deux jeunes Carlsen et Cheparinov entrèrent dans la salle de presse; ils ont fait une nulle dans une partie pas trop excitante. Mais il y a eu un moment très important lorsque les deux joueurs manquèrent quelque chose de grand : 22...Ne6 était un gâchis à cause des Blancs qui ont 23.Nxb7! Qxb7 24.Qc4, gagnant en retour la pièce avec un très grand avantage - un avantage gagnant d'après Shipov. A la place, Magnus réagit très poliment à la courtoisie de Cheparinov et prit seulement une toute petite avance qui n'était pas suffisante pour gagner selon lui.

Kamsky-Bacrot finit en nulle, mais également une « bonne partie combative » selon Bacrot (et qui ne voudrait pas être d'accord). Les deux joueurs ont préféré la position des Blancs après l'ouverture - spécialement après 20.Qg4. Kamsky dit : « Mes cavaliers semblaient très puissants là ». La position devint très compliquée et les deux joueurs perdirent beaucoup de temps. Shipov a aimé la manière dont Bacrot a commencé la contre attaque avec 28...c5! et 29...f5! qui fit de la place au centre et libéra ses fous. Par la suite, 37...f4! aurait pu donner des chances de victoire. Sur la fin, dès que Kamsky ressentit qu'il n‘était plus bien, il commença à jouer pour une nulle.

La plus longue partie de la ronde fut celle de Mamedyarov-Karjakin, mais pour les fans de Bakou, cela valait la peine d'attendre. Mamedyarov remporta une victoire bien méritée après avoir été bien mieux (et un pion en plus) dans de la majeure partie du jeu. La raison principale de cela est 20...Ng4?, un gâchis dans une position déjà difficile. « 10...d6 n'est peut-être pas le meilleur coup, 10...Na6 suivi de ...Nc5 est mieux » a dit Mamedyarov. « Oui mais de très bons joueurs ont joué 10...d6, comme Kramnik et Aronian » ce qui fut la motivation de Karjakin pour opter pour un coup légèrement plus passif. L'Ukrainien fut surpris de se retrouver dans une moins bonne position : « 12.Qb4 est supposé être le coup le plus dangereux ». Ainsi peut-être que la nouvelle idée de Mamedyarov 13.b4 et 14.Qb3 était simplement très forte. Là les Noirs auraient probablement dû jouer le plus naturel 14...Qc7 et 15...Rac8 (Shipov). Mamedyarov continua fortement (17.Qa4!, 18.Nd4!, 21.Nb5!) mais n'était pas satisfait de la manière dont il a joué la reine dans la finale. Et effectivement, Karjakin s'est héroïquement défendu et eu même des chances potentielles de se sauver, mais Mamedyarov réussit quand même à atteindre son objectif. Sergey Shipov a par la suite écrit sur Karjakin : « Sergey est comme un poisson hors de l'eau. Je ne me souviens d'aucun autre cas ces dernières années où il joua d'une manière aussi peu confiante. C'est dû à un nombre excessif de tournois qui mène à un manque de force ».